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Indicateurs de contrôle - et de secours ! - pour comptabilité analytique hospitalière et RTC

Indicateurs de contrôle - et de secours ! - pour comptabilité analytique hospitalière et RTC

 
Méthode posée comme indispensable depuis de nombreuses années par les tutelles et politiques hospitaliers, la comptabilité analytique fait l’objet d’un reporting réglementaire particulier en France. Si certaines informations analytiques sont à déclarer par tous les établissements publics de santé une fois par an au Ministère, avec contrôle des Agences Régionales de Santé et utilisation des fichiers et plateformes informatiques de l’Agence nationale Technique de l’Information Hospitalière (ATIH), elles n’en restent pas moins complexes à recueillir et à traiter.
 
(Une liste des abréviations utilisées est fournie en fin de document.)
 
Au premier rang de ces déclarations annuelles obligatoires se trouvent les Retraitements Comptables (RTC), anciennement nommés Compte Administratif Retraité (CAR). J’avais à peine 25 ans quand j’ai travaillé sur mon premier « CAR », à l’aube des années 2000. Autant dire que je me consacre depuis un temps certain à cet outil, que je trouve très intéressant pour identifier de premières estimations des coûts des établissements.
 
Las ! la méthode s’est largement complexifiée dans le temps (le fichier excel actuel ne compte pas moins d’une vingtaine d’onglets à renseigner ou à contrôler !). Je constate souvent une absence d’approche globale (et politique …) des résultats péniblement produits, une anxiété et une tension de nombreux contrôleurs de gestion ou attachés chargés de produire ces documents, tous les ans à la même époque, et - surprenante mais très répandue - une quasi absence d’analyse approfondie, circonstanciée et retraitée à des fins de compréhension et d’un authentique pilotage pour les responsables et les décideurs hospitaliers de son établissement.
 
C’est pourquoi, fruit de nombreuses analyses et de mises en pratique, cet article propose une petite série d’indicateurs, qui permet de contrôler en partie la qualité des résultats produits (d’un point de vue « de la vraie vie » et non pas simplement « mathématique », les résultats pouvant être justes de ce côté mais tout à fait incorrects au regard des activités et des indicateurs économiques et financiers de l’hôpital). Elle vise aussi à apporter rapidement et synthétiquement, de premières estimations de coûts, dans une vision non plus seulement économique mais surtout managériale.
 
 
 

Quelques rappels méthodologiques sur les retraitements comptables

(et la comptabilité analytique en général)

 
La formatrice et chargée d’enseignement que je suis entame toujours ses cours et sessions en comptabilité analytique hospitalière par un rappel des concepts fondamentaux en la matière, valables quel que soit le secteur social ou économique que l’on étudie.
 
Deux premières dimensions, presque physiques, sont d’abord à déterminer, et seront un puissant fil conducteur tout au long du processus analytique :
 
1ère dimension : quel est l’objet de coût ?
Le calcul porte-t-il sur les séjours ? sur les repas ? sur l’hôpital dans son ensemble ?
Dans le cas des retraitements comptables, l’objet de coût porte sur les activités sanitaires de l’établissement. Autrement dit, le but est de calculer le coût des sections d’hospitalisation de court séjour, de rééducation et réadaptation, de psychiatrie, d’Hospitalisation A Domicile, des actes externes, et des Missions d’Intérêt Général. La terminologie que je choisis ici n’est pas tout à fait la même que celle du guide, mais c’est pour mieux faire comprendre que l’on cherche à calculer dans le RTC, in fine, le coût des seuls services « cœur de métier » de l’hôpital (et effectivement, en l’occurrence, sont concernés les secteurs d’hospitalisation, de réalisation d’actes externes et des missions de santé publique et d’intérêt général). Dans la terminologie du RTC, ces services sont appelés « Fonctions Cliniques Principales/Défintives ».
 
 
2ème dimension : quel est le périmètre du coût ?
Plusieurs niveaux de coût peuvent être étudiés : coût d’approvisionnement; de façon plus large coût de production; encore plus globalement, coût de revient complet sur toute une année. Ainsi, le périmètre de coût représente l’ensemble des charges que l’on choisit de prendre en compte pour la détermination du coût.
Dans le cas des retraitements comptables, le périmètre de coût porte sur les seules activités du budget principal (on ne prend pas en compte, par exemple, les écoles de formation, les structures de long séjour ou les services médico-sociaux) sur un exercice entier (du 1er janvier N au 31 décembre N).
 
 
 
 
Outre ces dimensions fondamentales, qui auront un impact sur l’ensemble du processus de traitement et de calcul, il convient de rappeler les différents types de coûts possibles, car la méthodologie des retraitements comptables repose sur des choix précis.
 
Les types de rattachement de charges, et donc de coûts :
 
4 grands types de coût peuvent être calculés (les choix sur les uns pouvant s’ajouter à d’autres) :
 
 
 
 
En quelques mots :
 
Les charges directes sont affectables - et le mot-clé est le suivant - « sans ambigüité » à l’objet de coût.
Alors que les charges indirectes sont des dépenses qui sont consommées par plusieurs objets de coût. Elles sont alors réparties au moyen d’unités d’œuvre.
 
Les charges variables évoluent à due proportion des volumes d’activité. Elles peuvent être représentées par une fonction linéaire. 
Alors que les charges fixes ne sont pas sensibles aux variations d’activités, jusqu’à un certain point. C’est pour cela que l’on dit qu’elles évoluent par palier.
 
Les coûts partiels sont calculés à partir de certaines charges, de quelque nature que ce soit.
Alors que les coûts complets prennent en compte la totalité des dépenses telles qu’évaluées au travers du compte de résultat principal.
 
Les coûts standards sont calculés avec des données et des informations de type prévisionnel ou reposant sur des hypothèses et des scénarios. Ces données, de par leur nature « hypothétique » ne sont en général pas disponibles dans le système d’information.
Alors que les coûts réels sont l’exact reflet des dépenses et des unités d’œuvre enregistrées et requêtables dans les applications de l’établissement.
 
 
Si ces notions sont communes à tout système de comptabilité analytique, quel que soit le secteur d’activité ou l’entreprise, les Retraitements Comptables reposent, eux, sur des choix bien clairs : il s’agit de calculer in fine le coût complet des objets de coût « Fonctions cliniques principales », en distinguant les charges directes et les charges indirectes, et à partir des données réelles historiques (on travaille en général sur l’exercice N-1) contenues dans les systèmes d’information des établissements publics :
 
 

 

Les indicateurs de contrôle

Les prochains acronymes risquent d’effrayer et de rebuter tout professionnel qui n’utilise ni ne produit ce document, mais l’expérience m’a montré que le calcul et les précautions suivantes redonnent confiance et matière à contrôle pour les personnes qui réalisent les retraitements comptables.
 
1er contrôle : l’évolution des dépenses, par compte, d’un exercice à l’autre
Le fichier excel des retraitements comptables contient un onglet très important, nommé en 2014 « Charges et produits CRP ». Il repose sur la saisie des informations du compte financier lui-même, et tel qu’il a été validé à la clôture comptable. Un grand nombre de contrôles se fait à partir des informations saisies à cette étape.
Si les montants intermédiaires et totaux sont aisément contrôlables avec les documents des comptes financiers, il convient, pour la qualité des données produites et pour le « réalisme » des indicateurs qui seront produits par la suite, de contrôler, compte par compte, les variations entre l’exercice N et l’exercice N-1.
Nous recommandons d’analyser et de comprendre toutes les variations supérieures à + 10 % ou inférieures à – 10 %, ainsi que les faibles montants. Ces éléments peuvent ainsi mettre en évidence des erreurs de saisie ou d’affectation.
 
2nd contrôle : la cohérence des effectifs déclarés en personnel
Les services financiers, de contrôle de gestion ou des ressources humaines ne font parfois pas de lien entre deux chantiers pourtant réglementaires et à déclaration obligatoire, que sont la Statistique Annuelle des Etablissements (SAE) (en général à produire au 1er trimestre), et les retraitements comptables (transmis, eux, à l’été). Or, tous les deux contiennent les effectifs en personnel, par section et par profil. Des rapprochements et des contrôles de cohérence sont donc à mener, les effectifs déclarés dans l’une devant être équivalents avec ceux saisis dans les autres.
Aussi surprenant que cela puisse paraître, j’ai remarqué à de très nombreuses reprises que ce contrôle n’est pas réalisé, alors même que SAE et retraitements comptables sont utilisés par leurs destinataires – les tutelles – qui peuvent alors mettre en question les résultats transmis.
 
3ème contrôle : le taux d’exhaustivité des unités d’œuvre
Afin de répartir les charges indirectes (comme la logistique médicale, la restauration, la blanchisserie etc…), des clés de répartition, appelées unités d’œuvre sont à utiliser. Leur format et leur périmètre sont décrits, et elles ont un impact direct sur le montant du coût de certaines activités.
Par exemple, pour calculer le coût d’un repas, les Retraitements Comptables amènent à identifier les charges directes affectables sans ambigüité à l’activité de la restauration. Ce montant en € sera alors ensuite divisé par le nombre de repas déclaré. Or, si ce dernier ne recueille pas l’ensemble des repas effectivement et réellement produits, le coût de l’unité d’œuvre, mathématiquement et mécaniquement, va être plus important que la réalité.
L’exhaustivité des unités d’œuvre produites est donc un critère déterminant directement susceptible d’améliorer le coût des activités réalisées.
Bien entendu, la complétude de ce recueil est très dépendant des systèmes d’information des établissements et des pratiques de saisie. Cependant, des recoupements sont possibles pour estimer cette exhaustivité, notamment avec la SAE (encore une fois…), en calculant les variations du nombre d’unités d’œuvre d’un exercice à l’autre (toute diminution doit attirer l’attention), et le coût des unités d’œuvre en tant que tel.
A ce dernier titre, j’affectionne tout particulièrement le «Coût moyen par ETP » (c’est-à-dire l’ensemble des charges de personnel, rapporté aux effectifs), que l’on peut comparer aux coûts moyens par grade ou par profil, généralement connus et suivis par les services des ressources humaines. Si cette démarche peut « heurter » le lecteur légitimement soucieux de la qualité des soins, j’ajoute que je ne suis pas dans le jugement de valeur mais bien dans la recherche d’éventuelles erreurs. L’expérience montre que l’on a parfois des surprises avec des coûts très hauts … ou très bas, ce qui peut biaiser d’autant les évaluations externes, et à terme les justifications de ressources, de l’établissement. Et là, çà devient alors un vrai problème de qualité des soins …
 
4ème contrôle : le recoupement sur les activités subsidiaires
L’un des axes de valorisation, y compris économique et financier, des ressources des établissements réside dans la claire identification de ses missions d’intérêt général. Ces dernières sont tout à fait transposables à une partie des « Politiques nationales » déclarées dans la SAE (encore encore une fois…). En d’autres termes, si une des politiques nationales est déclarée dans la SAE, les Retraitements Comptables doivent logiquement dédier une section d’analyse pour chacune d’elles, et identifier des charges à leur endroit (et notamment si des effectifs ont été saisis dans la SAE).
 
 

Les indicateurs d’analyse

Parce qu’il n’est pas toujours facile, souvent après plusieurs semaines de traitements, de calculs, de saisie et de recherche, de se faire une idée synthétique des résultats produits, avant toute transmission, et par la suite pour une présentation plus managériale des résultats analytiques, voici quelques indicateurs dont le calcul est conseillé et fait suite, à nouveau, à une longue pratique de notre part :
 
 
 
Même si l’élaboration de ce chantier analytique réglementaire reste lourde et parfois difficile, je reste convaincue de l’utilité et de la pédagogie de cet outil, et utilise régulièrement, en conseil et en formation, toutes les indications ici apportées.
Bonne chance !
 
 
Abréviations
 
ATIH     Agence Technique de l’Information Hospitalière
CAR      Compte Administratif Retraité
CRP      Compte de Résultat Principal
DIM      Département d’Information Médicale
DMS     Durée Moyenne de Séjour
ETP      Equivalent Temps Plein
HAD     Hospitalisation A Domicile       
MCO     Médecine Chirurgie Obstétrique
MIG      Mission d’Intérêt Général
RTC      Retraitements Comptables
SA        Section d’Analyse
SSR      Soins de Suite et de Réadaptation
 
 
Documentation
 
Ministère des Affaires sociales et de la Santé, « Comptabilité analytique hospitalière »
 
Agence Technique de l’Information Hospitalière, « Information sur les coûts »
 
 
 
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Posté le 13 mai 2016 par Nathalie L'Hostis